En laboratoire, en enceintes contrôlées, des plantes peuvent présenter une capacité à absorber certains polluants gazeux. Cette capacité peut être influencée par différents paramètres physiques et/ou biologiques. Dans les bâtiments, en conditions réelles d’exposition, l’efficacité d’épuration de l’air par les plantes seules est inférieure à l’effet du taux de renouvellement de l’air sur les concentrations de polluants. Autrement dit, l’aération et la ventilation restent bien plus efficaces que l’épuration par les plantes. Par conséquent, l’ADEME considère que l’argument “plantes dépolluantes” n’est pas validé scientifiquement au regard des niveaux de pollution généralement rencontrés dans les habitations et des nouvelles connaissances scientifiques dans le domaine. En matière d’amélioration de la qualité de l’air intérieur, la priorité reste la prévention et la limitation des sources de pollution (entretenir les chauffe eaux et chaudières, réduire l’utilisation de produits chimiques ménagers,…) accompagnées d’une  ventilation ou plus généralement d’une aération des locaux (entretien du système de ventilation, ne pas bloquer les orifices d’aération, ouvrir les fenêtres tous les jours quelques minutes…).

Enjeux
Le Grenelle de l’Environnement a confirmé la qualité de l’air intérieur comme un enjeu de santé publique. Le mode de vie urbain nous amène à passer près de 90% du temps dans des espaces clos où nous sommes exposés à des polluants d’origines diverses (chauffage, mobilier, produits d’entretien et de décoration, etc.). Il est aujourd’hui nécessaire d’améliorer la connaissance des polluants afin de mettre en œuvre des mesures appropriées de gestion de la qualité de l’air intérieur.

L’épuration de l’air intérieur par les plantes connaît un intérêt croissant auprès du grand public et des médias. Les plantes dites « dépolluantes » sont présentées comme un moyen d’amélioration de la qualité de l’air intérieur. L’ADEME et les conseils régionaux Nord-Pas de Calais et des Pays de la Loire ont lancé le programme de recherche PHYTAIR qui est financé également par des fonds européens (FEDER). Ce programme permet d’établir un protocole standardisé complet pour évaluer les capacités épuratrices des plantes dans des conditions réalistes c’est-à-dire dans les logements, les bureaux, les lieux clos ouverts au public. L’avis de l’ADEME se base sur les conclusions de ce programme qui tient compte des niveaux de concentration en polluant, de la durée d’exposition, des configurations de plantes et des conditions de ventilation intérieure.
Description
La capture des polluants par les plantes a lieu soit au niveau du système foliaire, soit au niveau du système racinaire. La capture par les feuilles des polluants présents dans l’air se fait par les stomates (orifices des feuilles facilitant l’entrée du polluant sous forme gazeuse) et par la cuticule des feuilles (certains polluants s’y déposent en surface). La capture se fait également dans le sol par les racines, lesquelles absorbent les polluants dissous dans la solution de sol. Les polluants ainsi captés s’accumulent et/ou sont progressivement métabolisés c’est-à-dire dégradés.

Chiffres clés
Avec la prise de conscience des questions sanitaires en air intérieur, le marché des plantes dites “dépolluantes” connaît, depuis quelques années, en France, un essor important. De plus en plus de distributeurs spécialisés (jardineries, etc.) les inscrivent dans leurs catalogues de vente. Une quarantaine de plantes sont actuellement référencées. Les arguments commerciaux qui font généralement la promotion des plantes dites “dépolluantes” ne sont pas toujours fondés sur des études scientifiques. La plupart se réfèrent toutefois aux études réalisées par le Dr. Wolverton, pour le compte de la NASA dans les années 80, sur la capacité épuratrice des plantes dans l’air intérieur. Ces travaux donnent des résultats, pour une liste de plantes exposées en conditions contrôlées, sur une courte période d’exposition et à des doses très élevées en polluants ce qui reproduit les conditions à l’intérieur des capsules spatiales.

En résumé
Points forts :

  • capture des polluants par les plantes en laboratoire
  • intérêt pour la biosurveillance de l’air intérieur (indicateur potentiel de la qualité de l’air)

Points faibles :

  • des qualités épuratrices chez les plantes peu efficaces en milieu réel d’exposition
  • possibles impacts sanitaires pour certaines plantes (personnes allergiques)

 

Avantages/inconvénients
Avantages

  • Capture des polluants par les plantes
    Le programme PHYTAIR montre, en conditions contrôlées en laboratoire (injection unique ou continue de polluants dans une enceinte) pour trois plantes d’intérieur (dragonnier, pothos et la plante araignée), une capacité à capturer certains polluants. Les capacités d’épuration de l’air diffèrent d’une plante à une autre et selon les polluants (les concentrations de polluants diminuent entre 30% et 90%). Ainsi, le monoxyde de carbone (CO) diminue en plus forte proportion comparée aux deux autres polluants étudiés (benzène et formaldéhyde). Par ailleurs, l’efficacité d’épuration de l’air par les plantes peut être limitée par des paramètres non biologiques comme la baisse de la température et l’augmentation de l’humidité. Enfin, des recherches ont souligné le rôle primordial du substrat dans les phénomènes d’épuration grâce à certains micro-organismes présents au niveau des racines chez les plantes. Les systèmes dits «actifs » par biofiltration avec un passage forcé de l’air à travers le substrat des plantes pourraient permettre une meilleure épuration de l’air. Le programme PHYTAIR a notamment testé un système biofiltré mais qui ne révèle pas de contributions significatives à la diminution des niveaux de polluants observés dans les conditions de l’étude. L’efficacité réelle de l’ensemble de ces systèmes reste à évaluer selon des protocoles standardisés (ou normalisés).
  • Intérêt pour la surveillance de l’air intérieur
    Les polluants peuvent favoriser des effets dommageables chez des plantes dites sensibles (effets visibles par nécroses foliaires ou effets non visibles au niveau du génome et de la régulation enzymatique). Connaître les effets des polluants sur les plantes permet donc de les utiliser comme indicateurs de la qualité de l’air intérieur (en biosurveillance végétale). Cet aspect a également été étudié dans le programme PHYTAIR.

 

Inconvénients

  • Capacités d’épuration à étudier en exposition réelle
    La dernière phase de PHYTAIR a permis de tester les capacités d’épuration des plantes en jardinière dans des conditions réelles d’exposition, notamment en terme de ventilation dans une pièce et de configurations des plantes. L’ensemble des essais d’exposition réalisés avec des sources multiples et complexes (type chauffage d’appoint, bâton d’encens et parquet en pin) ne permet pas de conclure quand à une potentielle efficacité des plantes sur l’élimination des polluants étudiés. L’efficacité du système plante en jardinière serait donc quasi nulle en condition réaliste d’exposition, c’est-à-dire avec 4 jardinières au maximum par pièce. Il reste néanmoins à développer des travaux de recherche dans le domaine de la quantification du rôle du substrat (plante/sol).
  • Possibles impacts sanitaires ou environnementaux
    La plupart des plantes d’intérieur ne présentent pas d’effets délétères pour la santé, mis à part dans certains cas bien spécifiques. En revanche, elles peuvent être à l’origine de quelques désagréments : blessures causées par les épines, irritations cutanées, projections oculaires, allergies. La sève de certaines plantes peut même être très irritante, voire toxique. Par ailleurs les substrats sur lesquels poussent les végétaux peuvent favoriser le développement de moisissures, dont certaines génèrent des allergies, des irritations ou des infections… Enfin, si les végétaux sont mal entretenus par leurs propriétaires cela peut nuire à la physiologie de la plante et conduire à des effets sur la santé (après un mauvais usage de produits de traitement pouvant notamment être toxiques).

 

Actions de l’ADEME
La plupart des travaux scientifiques sur les capacités épuratrices des plantes ont permis de confirmer les qualités intrinsèques de certaines plantes mais sans toutefois approfondir les connaissances sur leur comportement en présence d’un mélange de polluants ou sur le rôle du substrat. Beaucoup de ces travaux portent sur des expositions courtes à des concentrations élevées en polluant et en conditions contrôlées d’exposition. Afin d’améliorer la connaissance sur la capacité des plantes à épurer l’air, dans des conditions les plus proches de la réalité, l’ADEME soutient, depuis 2004, le programme PHYTAIR.
Ce programme de recherche est mené par le Laboratoire des Sciences Végétales et Fongiques de la Faculté de Pharmacie de Lille en partenariat avec le Centre Scientifique Technique du Bâtiment (CSTB – phases 1 & 3) et le laboratoire PC2A de l’Université Lille 1 (phases 1 & 3), avec la participation de l’association Plant’Airpur (phase 1). Il a eu pour objectif d’établir un protocole scientifique d’évaluation objective de l’épuration de l’air intérieur par les plantes.
Trois espèces de plantes (pothos, dragonnier et la plante araignée) et trois gaz sont étudiés (monoxyde de carbone, benzène et formaldéhyde) à des doses relativement faibles. Ces polluants sont fréquemment retrouvés dans l’air intérieur des logements. Ces plantes sont choisies en raison de caractéristiques foliaires différentes.
PHYTAIR s’intéresse aux mécanismes biologiques et physiologiques mis en jeu par les plantes, ainsi qu’aux éventuelles applications de la bio-surveillance végétale dans le domaine de la qualité de l’air des environnements intérieurs.

(Source : Les avis de l’ADEME, 12 septembre 2011)