La vingtième édition du Festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire (41) a pour thème : “Jardins d’avenir ou l’art de la biodiversité heureuse”. Elle donne à voir et parcourir des jardins d’alerte, des jardins du futur, des ateliers de (re)découverte et de reconstruction de notre diversité, des tableaux vivants forces de proposition, de recherche et d’innovation scientifique et artistique. Voici un petit aperçu glané lors de ma visite il y a quelques jours.

“Manier avec précaution” par Jeroen Jacobs architecte-paysagiste et Maarten Jacobs, designer, (Pays-bas).
Métaphore des menaces pesant sur la nature, ce jardin fragile est une invitation à manier les plantes avec précaution. Nous devons en prendre soin comme de nous mêmes. Il faut manier la nature avec précaution aujourd’hui pour pouvoir jouir demain d’une biodiversité heureuse.

Je suis sûr que vous n’aviez pas pensé à ces surprenants tuteurs pour vos roses trémières…

“Le pollen exubérant” par Yekaterina Yushmanova architecte-paysagiste et Ruth Currey conceptrice paysagiste (États-Unis et Canada).
Pour imaginer l’avenir des jardins, nous nous tournons inévitablement vers leur passé. Ce jardin propose une exploration de l’héritage des jardins anémogames. Le pollen capture l’histoire de chaque plante et de ses ancêtres, puis chevauche le vent et permet de créer des nouvelles combinaisons de vie.


“Entre ciel et terre” par Wang Xiangrong, jardin réalisé avec le concours de Gérard Dosba.
Wang Xiangrong a créé dans son jardin un paysage brumeux, en référence à l’archétype du jardin chinois développant un sentiment de poésie brumeuse et de sérénité. Terre et eau, couleur rouge, bleu du ciel et nuages blancs constituent des constantes dont se joue ce jardin très contemporain.


“La nature des choses” par Soline Portmann, Aurélie Zita et Mioko Tanaka, scénographes (France).
Quand la nature reprend ses droits… Le prototype d’une maison contemporaine se détache sur une pelouse artificielle, verte et bien entretenue. Mais quand le visiteur a franchi cette nature domestiquée, il suit le chemin tracé vers la maison et il entre dans l’habitat où la nature reprend peu à peu ses droits. À l’intérieur, la nature coexiste avec l’être humain et le végétal se développe en dialogue avec le mobilier intérieur. Comme ce potager qui pousse dans la cuisine. Dans ce jardin d’avenir, l’homme et la nature vivent ensemble, sans contrôle de l’un sur l’autre.



“Le laboratoire” par Meryl Fanien paysagiste, Philippe Guillemet sculpteur et Cyrille Parlot paysagiste (France).
Ce jardin nous raconte l’histoire d’un jardin du futur renaissant après une catastrophe. Le jardin proprement dit est un territoire où renaissent les frêles graines et boutures, précieusement ramassées et conservées dans l’atelier, lieu d’expériences et refuge. “Le laboratoire” met en scène différents écosystèmes destinés à coloniser un monde dévasté.


“Lucy in the sky” par Chilpéric de Boiscuille, Raphaëlle Chere, Pauline Szwed et Benjamin Haupais – Sativa Paysage.
Ce jardin nous entraine en ville sur le toit d’une tour et met en évidence toutes les possibles d’un jardin urbain hors-sol. Le jardin du futur est sur la ville. Il la contemple et par-delà contemple son grand paysage. S’il est déraciné, il s’adapte et emprunte à la technique ses ressources : cultures hors-sol, palette des épiphytes, hydroponie, tapis végétalisés, énergie solaire et brumisation.

“Le jardin à la rue” par Julien Maieli architecte paysagiste et Germain Bourré designer (France).
Et si dans un avenir proche, par choix ou par nécessité, la biodiversité devenait la raison d’être de la rue, au point de revoir complètement son aménagement et changer le visage des villes de demain ? Et si le jardin de demain était la rue ?
Ce jardin propose une vision pour l’avenir où le jardin et la biodiversité sont des éléments structurels de la rue : stations de lagunage le long des trottoirs, lampadaires photovoltaïques récupérateurs des eaux de pluie qui accueillent des fleurs d’alpage et des fruits des bois, circulation sur un tapis enherbé où seules les extrémités sont foulées, liants à base d’algues pour remplacer le bitume des rues et plantes grimpantes pour réguler les températures.

“Le jardin à emporter” par Steve Papps paysagiste, Jo Chapman artiste et Jackie Bennett paysagiste (Royaume-Uni).
Imaginez un monde où chaque citoyen a l’opportunité de prendre soin de son propre micro-habitat. Des toits en terrasse aux parcs de stationnement, des jardins suburbains aux décharges industrielles, aucun espace n’est trop petit pour un sac, avec un seul arbre et un écosystème connexe. Une nouvelle vie est donnée à des sacs utilisés pour transporter des matériaux de construction, qui deviennent un verger, une forêt, une lande maritime, un petit bois, une haie ou un marais…

“Célébrons et tissons la (bio)diversité” par Sandra Dufour artiste textile, Simon Visconti architecte et Manon Bordet-Chavanes ingénieure paysagiste (France).
Au ciel, un patchwork de motifs floraux et végétaux symbolise les particularités des hommes, leurs aspirations et leurs inspirations communes. Au sol répond à cette diversité la biodiversité avec une multitude de pots et plus de 80 espèces de végétaux. Le jardin s’articule autour d’un arbre, auprès duquel les visiteurs peuvent s’asseoir.

“Le jardin des marées” par Sarah Foque architecte paysagiste et artiste – Space Invasion, Roland Horne, Jeremy Clark, Jos Gibson et Olly Hurst – Aquarium Architecture et Stan Van der Laan entrepreneur paysagiste (Royaume-Uni).
Ce jardin évoque la beauté cachée et méconnue des jardins sous-marins, jardins d’avenir à préserver. Il est composé de quatre types d’environnements (en photo, la zone de marais d’eau salée, inondée deux fois par jour par l’eau).

“Le jardin des plantes disparues” par Denis Valette architecte DPLG et Olivier Barthélémy sculpteur (France).
Ce jardin énonce, à travers l’évocation systématique des espèces végétales disparues, la dissociation violente qui s’est établie entre l’homme et la nature. Sur le pourtour du jardin, les carrés d’étiquettes évoquant les espèces disparues sont recouverts par d’épais massifs d’arbustes, qui semblent vouloir recoloniser la surface ordonnée du sol. À l’arrière, des buissons de végétation abondante, fleurie et odorante, invitent à réintégrer le coeur de la nature.


“Le jardin de Madame Irma” par Emmie Nyk architecte-paysagiste, Gladys Griffault architecte DPLG, Pascale Trouillet et Clara Juncker architectes d’état (France).
Lieu de rencontre et d’imaginaire, le jardin de Madame Irma propose un voyage au visiteur guidé par les prédictions de l’hôtesse qui l’accueille chez elle. Derrière la roulotte, une profusion de plantes, une nature hors du commun.

“Les bulbes fertiles” par Stéphane Berthier et Xavier Bonnaud architectes, Clément Bouchet assistant – Mesostudio, Fabien Gantois architecte – Gantois Malige Architecture, Étienne Panien paysagiste – Les 2 Cyclopes, Olivier Duraysseix et Guillaume Pezet jardiniers – L’envers du jardin (France).
La biodiversité prend naissance dans la qualité du sol. Le jardin des bulbes fertiles donne à sentir la richesse du travail souterrain. Il exprime la simplicité du coin de compost pour faire écho au cycle de l’humus. L’étrange présence des ces formes tissées, leur gonflement, l’interrogation sur leur contenu; la lumière qu’elles accrochent composent un univers chaleureux.


“Graines d’espoir ou le jardin d’un regard partagé” par les étudiants et professeurs des École Boulle et École du Breuil.
Composé de plantes ordinaires ou extraordinaires, de la fleur à la graine, ce jardin offre un statut de désirées aux indésirables. Les graines y sont présentées comme de petits bijoux fixés sur des tiges. Les rejetés de la biodiversité paradent.

“Le jardin pixélisé” par Mattéo Pernigo architecte – Angea Studio Associato et Claudio Benna paysagiste (Italie).
Ce jardin imagine le futur comme étant en développement technique continu et joue avec des pixels colorés, rien ne pouvant mieux transmettre la couleur que les plantes. Il se sert de matériaux récupérés, recyclés et réutilisés. Élément principal, l’eau purifiée par les plantes aquatiques est agitée et oxygénée par un système actionné par des éoliennes.

“L’envers du décor” par Cathy Vivies et Vanessa Farbos conceptrices de jardins (France).
Ce jardin d’alerte a été inspiré par un tableau de Gustave Courbet et invite à porter une attention particulière à l’exubérance végétale initiale et à ce que nous risquons d’en faire si nos envies ne sont pas éclairés par notre conscience. Jusqu’où pouvons nous organiser le végétal ?Ne risque-t-on pas de retrouver partout les mêmes jardins ?

“La sève à la croisée des chemins” par Ernesto Neto artiste et Daisy Cabral Nogueira paysagiste.
Le jardin est un lieu de rencontre, un lieu de partage des idées, carrefour éthique, carrefour des destins. En entrant dans ce jardin, vous entrez dans une fleur. Le disque central représente le pistil, les massifs de canne à sucre sont les étamines. Les plantations de canne à sucre représentent aussi une alternative aux énergies fossiles en produisant une sève dont on tire de l’éthanol, qui serait une solution verte par rapport au pétrole et au charbon.


“La biodiversité en question” par Olivier Chardin architecte-paysagiste – AOC Paysage, Philippe Verignon, architecte-paysagiste et Anaïs Brochiero photographe assistante paysagiste (France).
Ce jardin d’avenir s’inspire du mythe de Pandore. L’énorme cube au centre du site représente la boite de Pandore entrouverte d’où s’échappent en rayonnant différentes plantes évoquant les grands questionnements sur la biodiversité végétale.

“La bibliothèque du souvenir” par Gaëtan Macquet architecte DPLG, Oréline Tixier architecte et Pierre-Albert Labarrière paysagiste (France).
Ce jardin est un conte évoquant un mystérieux jardin du futur. Le personnage, Oréline, découvre qu’elle se trouve dans une bibliothèque vivante dans laquelle se trouve une collection de graines de plantes disparues. Cet endroit est un lieu de mémoire de l’histoire du monde végétal. Il est la résultante de la destruction massive de la nature engendrée par l’homme.

“Sculptillonage” par Corinne Julhiet-Detroyat paysagiste et Claude Pasquer architecte-paysagiste DPLG (France).
Le sculptillonage, en référence aux hortillonnages, est une sculpture végétale ou animale qui indique au jardinier les espaces de biodiversité, les limites de la tonte, les circulations… Tout en dessinant une forme artistique et ondulatoire. Principaux acteurs de ce jardin, les champicomposteurs donnent une image souriante et simple du compostage. Allier création artistique et développement durable, magnifier le geste du jardinier dans la biodiversité, tel est le double message de ce jardin.
Ceci n’est qu’un bref aperçu de ma visite, quelques photos qui ne vous donnent qu’une infime partie de ce que le Festival international des jardins vous propose et vous invite à découvrir. Dans les jours et semaines à venir, je reviendrai plus en détail sur certains de ces jardins et je voudrais aussi vous parler des installations et oeuvres d’art contemporain qui sont présentées dans le Domaine de Chaumont-sur-Loire… À suivre !
Festival international des jardins
Domaine de Chaumont-sur-Loire
Du 22 avril au 16 octobre 2011
Tél. : 02 54 0 99 22.
www.domaine-chaumont.fr
Il est très facile et rapide d’aller visiter le Festival international des jardins depuis Paris en prenant le train à la gare d’Austerlitz.
Une journée suffit pour découvrir les jardins et la plupart des expositions (c’est ce que j’ai fait), tout étant prévu dans le site pour déjeuner et faire des pauses gourmandes.
Descendre à Onzain, traverser la Loire puis rentrer dans le village de Chaumont-sur-Loire.
Le Domaine de Chaumont-sur-Loire accorde a toute personne qui présente en caisse un billet de train à destination d’Onzain daté du jour et composté :
- une entrée au Festival des jardins à tarif réduit : 8,50 € au lieu de 10 €.
- une entrée au Festival des jardins + visite du château + les écuries + le parc + les expositions a tarif réduit : 12,50 € au lieu de 15,50 €.
- une entrée pour le château à tarif réduit : 7,50 € au lieu de 9,50 €.
Au fil des jours et semaines à venir, je vais présenter individuellement les jardins du Festival avec davantage de photos pour chacun. Cela permettra de se faire une meilleure idée car il est difficile de juger je pense sur une seule ou deux photos seulement et je reste convaincu que rien ne vaut une visite sur place, voire deux, tant les jeux de lumières sont importants et donc très variables selon le moment de la journée et l’intensité du soleil. Les mouvements sont aussi importants (vent dans les feuillages et les structures, vol des insectes) et ils ne peuvent que difficilement se montrer en image… Mais bon, je ne suis certainement pas impartial, j’ai beaucoup aimé cette édition 2011 et il n’y a guère qu’un ou deux jardins qui m’ont déplu… Et je serais curieux de revoir certains jardins en fin d’été, dans toute leur opulence.
Désolée, Anne, de ne pas partager votre point de vue ! Concepteur, avec Claude Pasquer, du jardin Sculptillonnages, nous y avons mis beaucoup de poésie, d’onirisme, autour de prairies fleuries, d’abreuvoir à papillons, de tournesols géants, abris pour abeilles solitaires, de distributeurs de brin sde laine pour les nids des oiseaux, d’arrosoirs pour l’eau bien sûr, bref tout pour attirer les amis auxiliaires du jardin, 20 coccinelles pour le 20ième festival et 1 puceron bien caché, 4 champicomposteurs qui expriment la décomposition-mort avant la renaissance et la source de vie pour bref si ces champicomposteurs ne sont pas innovants et si le jardin n’est pas que poésie, je ne sais plus que dire ! Quant à sa beauté, je vous l’accorde, c’est très subjectif mais…
Voilà, hors tendance, j’avais envie de “défendre” notre jardin ! et beaucoup de ce jardin peut être adapté à un “vrai” jardin pour gérer un espace de biodiversité et un espace travaillé par le jardinier ! Bien cordialement
Quand un thème est donné et que l’on voit les résultats on ne peut que voir de la création, que cette création plaise ou pas.
J’ai moi-même participé à une sorte de concours avec une vue à encadrer et fallait voir la diversité des “devoirs rendus” pour une vue identique imposée à tous les candidats. Mon encadrement était certainement parmi les plus originaux, sinon le plus original, commentaire de ma prof. Mais était-ce là de la beauté que j’avais créée, de la poésie ? J’avais innové en sortant des sentiers battus.
Même quand une oeuvre ne me plait pas à moins que ce soit de l’arnaque pure et simple, ça axiste aussi, je considère toujours le travail de celui qui a composé l’oeuvre.
En regardant à nouveau les photos je ne vois rien de laid, c’est mon avis bien sur, mais de l’humour, du bizarre, de l’insolite et du Travail. De plus il y a une forme de morale derrière toutes ces mises en scènes.
Si on se cantonne à la tradition, rien ne bouge. C’est ce qui avait été dit au moment de la création de la pyramide du Louvres et les monuments n’auraient pas évolués, ce qui ne veut pas dire qu’ils évoluent toujours en bien.
on répète à qui mieux mieux ( c’est tendance ! ) à propos de ce festival 2011 , que c’est créateur , c’est innovant , mais ds quel domaine ? certainement pas ds celui de la poésie , de la beauté , c’est introduire la matière fabriquée svt si laide par les humains , dans la nature . J’ai trouvé ds ces photos que du laid , c’est mon opinion , vous en avez d’autres , en tout cas je suis contente d’avoir vu ce reportage ( je suis désolée Alain, vous n’êtes évidemment pas en cause )car cela m’économisera un voyage .
je garde un excellent souvenir de juillet 2010 lors de ce festivalet je préfère rester sur ces bonnes impressions
Toujours autant époustouflée par l’imaginaire des créateurs. Je garde ce message pour le revoir en détail un peu plus tard. Merci de nous faire partager un moment à Chaumont avec ces jardins extraordinaires.
Je squatte le post: je voulais bien sûr écrire “le jardin pour Laurent Perrier” ou “le jardin Laurent Perrier”, mais par contre, je ne me souviens plus du nom de l’architecte.
Je me rends compte que mon commentaire est par trop négatif.
Cela n’empêche pas d’apprécier les différentes scènes que tu présentes ;)
Mais beaucoup sont, pour moi, de l’ordre de la curiosité, du clin d’oeil, et je préfère celles qui peuvent en outre être adaptées.
C’est sympa, c’est innovant, mais à l’exception des derniers, c’est un peu comme la haute couture: importable!
Dans une revue de jardinage, on montre le jardin de Laurent Perrier au Chelsea: superbe et innovant tout en restant transposable.
Je trouve qu’entre le conceptualisme et le kitsh (Floriades aux P-B, Floralies gantoises), il y a une voie médiane.