Comment résister à la privatisation du vivant ? Comment devenir acteur de la biodiversité ? La Ville de Montreuil en partenariat avec l’association Graine de Jardins vous invite le samedi 31 mars 2012 à un débat concernant la privatisation du végétal et les actions citoyennes possibles pour résister et maintenir la biodiversité. Ce débat sera suivi d’ateliers pratiques d’initiation à la récolte de semences et démonstration de greffage.

Combinée à l’abandon de variétés traditionnelles au profit de semences industrielles, la privatisation du vivant végétal (à travers les brevets et les certificats d’obtention végétale) par les grands semenciers et les laboratoires, fait peser une menace très grave sur la biodiversité. Ce mouvement de “biopiraterie” qui s’effectue à l’échelle planétaire est très peu relayé par les médias du fait de son caractère techniciste et spécialisé tandis que de leur côté, les lobbies des multinationales – très bien organisés à Bruxelles – continuent leur avancée pour influencer le cadre juridique des autorisations de semences, et ce malgré le refus majoritaire et récurrent des députés européens (Verts) et la militance mondiale des associations pour protéger le vivant et l’agriculture paysanne.

L’affrontement entre les tenants de la préservation de la biodiversité cultivée et les industriels du secteur agroalimentaire se joue en effet sur le terrain du droit, que ce soit au niveau national ou européen. Par exemple, votée en décembre 2011 et passée inaperçue dans l’opinion publique, la loi relative aux certificats d’obtention végétale a été présentée par les parlementaires comme un texte visant à mettre la France en conformité avec un accord international sur les obtentions végétales datant de 1912.

En fait, cette loi sert surtout à protéger les intérêts commerciaux des grands semenciers en interdisant aux paysans de ressemer les semences achetées sauf pour une vingtaine d’espèces mais pour lesquelles ils doivent acquitter des royalties. Le poids économique du secteur semencier a joué en sa faveur. La production et le commerce des semences représentent des sommes colossales, à titre indicatif le chiffre d’affaires à l’exportation des semenciers français dépasse le milliard d’euros en 2010-20113, selon le bilan publié par le Groupement National Interprofessionnel des Semences qui représente les intérêts de ce secteur.

La bataille juridique se joue au niveau européen sur la question de la commercialisation des variétés non inscrites au Catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées. Beaucoup de variétés n’y figurent pas car elles ne répondent pas au critère d’homogénéité qui stipule que toutes les plantes issues d’une même semence doivent être identiques.

Or les semences paysannes présentent une grande diversité génétique, chaque individu y est différent, d’où leur intérêt pour la biodiversité. Ces semences sont menacées de disparition si elles ne sont plus cultivées. Mais les résistances s’organisent.

Au niveau national, les réseaux mobilisés pour la défense d’une agriculture paysanne et pour la préservation de la biodiversité ont lancé une campagne commune intitulée “Semons la biodiversité“. Au niveau local, même à l’échelle d’un territoire comme Montreuil-sous-Bois (93), il est possible de s’organiser pour que la biodiversité urbaine et francilienne ne disparaisse pas pour les profits économiques de quelques-uns.

Par exemple, il est possible de participer à la conservation de semences et de graines rustiques cultivées dans les jardins en favorisant par l’échange et le don, la libre circulation des graines et des végétaux. En ce sens, la Ville de Montreuil utilise le portail des jardins partagés d’Ile-de-France pour y créer une page de troc destinée aux Montreuillois-e-s qui sera en ligne à partir de juin sur www.jardinons-ensemble.org

De leur côté, un nombre important d’associations montreuilloises ont à cœur de protéger la biodiversité et sont depuis longtemps actives en ce domaine. Parmi elles, figurent la Société Régionale d’Horticulture de Montreuil et le Sens de l’Humus qui présenteront leur action locale lors de la matinée du 31 mars.

Rendez-vous le 31 mars 2012 à Montreuil-sous-Bois !

Renseignements pratiques
Hôtel de Ville de Montreuil
Métro : ligne 9, station Mairie de Montreuil.
À partir de 9h30, de 10h à 12h30 suivi d’un pot.
Récolte de graines et greffe de 14h à 16h30
Entrée libre, réservation obligatoire au 01 48 70 67 94 ou par mail onseme@montreuil.fr pour le débat et pour les ateliers.Programme

9h30 : Accueil des participants autour d’un café, thé.
10h à 12h30 : Débat : Le végétal, patrimoine commun de l’humanité. Comment résister à la privatisation du vivant ? Comment devenir acteur de la biodiversité ?

Introduction Joslene Reekers, conseillère municipale, déléguée à l’environnement et à la nature en ville, Ville de Montreuil.

Intervenants :
Olivier BOREL, Doctorant en propriété intellectuelle à l’Université Toulouse 1
État des lieux des droits de la semence
Au 20ème siècle, la semence est passée de la main du paysan à celle du généticien pour être travaillée, façonnée et modifiée. Intégrée au commerce industriel mondial, sa production a été organisée à grande échelle. En conséquence, elle a progressivement fait l’objet de droits de propriété. Ces modifications de la nature juridique et organique de la semence posent diverses questions : que revêt la notion d’appropriation du vivant ? Quels sont les liens entre semences, droits sur les semences et société civile ?

Anne-Charlotte MOY, juriste, association Semences Paysannes
Semences paysannes : une réappropriation citoyenne
L’actualité juridique touchant aux semences est riche, entre la loi du 8 décembre 2011 sur les certificats d’obtention végétale et l’actualité de la Cour de Justice de l’Union Européenne sur l’affaire Kokopelli 4 ! Mais quels sont leurs impacts sur les semences de fermes et les semences paysannes ? En quoi les droits des agriculteurs et des jardiniers sont ils menacés ? Comment pouvons-nous nous réapproprier aujourd’hui nos semences et nos savoir-faire ?

Fred GERAL, membre de l’association Sens de l’Humus (Montreuil)
Du blé dans la ville ou comment (re)trouver un lien à la terre
Depuis 2008, le Sens de l’Humus mène des actions pour la défense et la promotion des semences paysannes à Montreuil, comme en témoigne le récent semis de blé paysan. L’objectif est aussi de sensibiliser les Montreuillois-e-s aux questions d’agriculture urbaine et d’autonomie alimentaire. Préserver la biodiversité cultivée et se réapproprier les savoirs liés à la culture de la terre sont des enjeux qui concernent également les urbains.

Guilain ROUSSEL, paysagiste DPLG, coordinateur du projet La Semeuse, association Les Laboratoires d’Aubervilliers (Aubervilliers)
La Semeuse
Le projet de La Semeuse vise à construire un réseau de jardiniers fédérant les initiatives autour de la biodiversité et du jardin.
Pour favoriser les échanges entre habitants, l’association a mis en place, entre autres, un jardin de multiplication de plantes sur l’esplanade des Laboratoires à Aubervilliers en lien avec une banque de graines nourrie de la diversité albertivilarienne.

Philippe SCHULLER, Secrétaire de la Société Régionale d’Horticulture de Montreuil
La pomme, naturellement créatrice de diversité génétique
Les pommes possèdent une particularité qui les distingue d’autres fruits bien connus de Montreuil comme les pêches. Pour se reproduire un pommier a besoin d’un pommier d’une autre variété. Cette caractéristique a pour effet de générer naturellement, lors de la fécondation des fleurs, de nouvelles variétés de pommes. Des pépins de chaque pomme de nos jardins peuvent naître de nouvelles variétés. Il est ainsi vraisemblable du fait de la densité de la production arboricole de Montreuil qu’il existe dans les jardins des pommiers à découvrir.

Jacques LEPAGE, webmestre, association Graine de Jardins
Troc en ligne !
Le portail des jardins partagés d’Ile-de-France, www.jardinons-ensemble.org accueillera prochainement une rubrique Troc. Dans cette rubrique, les habitants de Montreuil auront une page réservée pour leurs échanges. L’association en présentera le fonctionnement.
Le débat sera suivi d’un pot convivial.

14h à 16h30 : Ateliers pratiques – Hôtel de Ville.
Atelier greffe
Animé par Philippe Schuller, Société Régionale d’Horticulture de Montreuil.
Durée 2h30 – 15 personnes.
Les participants pourront assister à une démonstration de greffage et sont invités à amener un greffon (jeune rameau de l’année) de leur jardin pour le greffer et donner naissance à un nouvel arbre identique à l’arbre d’origine.

Atelier d’initiation à la production et à la récolte de semences
Animé par Fred Géral, Nadia Pisetta et Françoise Spuhler, Sens de l’Humus.
Durée 2h30 – 15 personnes.
L’atelier commencera par une rapide présentation des principaux aspects théoriques liés à la production et à la récolte de semences. Cette présentation sera illustrée par un diaporama montrant les méthodes utilisées par un petit semencier bio du Lot-et-Garonne, “Le Biau Germe”. Ensuite, mise en pratique de la récolte de semences avec des plantes amenées par les animateurs, mais qui pourront également être apportées par les participants.